Journée de la Déportation - Maison de France - 27 avril 2012 |
Écrit par Danielle Merlino |
Jeudi, 02 Mai 2013 09:09 |
Allocution prononcée par la Présidente de la Fédération des Groupements Français de Monaco à la Maison de France à Monaco
Mesdames, Messieurs,
Je remercie M. le représentant de SAS le prince Albert II, toutes les personnalités des corps constitués, des Ambassades et Consulats, des maires ou leur représentant des communes environnantes, des diverses Associations Civiles et militaires, et, toutes les personnes présentes pour avoir répondu à l’invitation de la Fédération des Groupements Français de Monaco, afin d’honorer la Cérémonie du Souvenir de la DEPORTAION. Nous ne pouvons pas commémorer le drame de la déportation sans évoquer le déporté Stéphane Hessel, récemment disparu, homme pétri d’humanisme et qui souffrit dans sa chair les affres de la seconde guerre mondiale. Le jeune Hessel se rend en France au début des années 1920 et fait des études de philosophie, via l’école normale supérieure. En 1940, il est proche de l’américain VARIAN FRY qui s’efforce de faire sortir de France, les intellectuels juifs allemands, menacés par le régime de Vichy, aux ordres de l’envahisseur. Réfugié à Londres, Stéphane Hessel travaille aussitôt pour le Bureau central des renseignements et d’action. Il est arrêté en 1944 au cours d’une mission et déporté à Buchenwald, Dora et Bergen – Belsen ; libéré par les troupes américaines sous une autre identité, il s’implique dés lors dans le processus qui conduit à la création de l’ONU. De fait, il évolue dans la sphère qui rédige la déclaration universelle des droits de l’homme, puis devient Ambassadeur. En toute circonstance, cet ancien déporté défendra les objectifs du Conseil National de la Résistance, et jusqu’au bout de son existence, il aura lutté contre l’oubli et pour le devoir de mémoire.
L’oubli c’est laisser sans s’en alarmer, se mettre en place les conditions sournoises d’un retour à la tragédie. Nous en connaissons les mécanismes qui prennent racine dans le conditionnement des populations, en s’appuyant sur la haine de l’autre, entretenue selon un processus qui a fait ses preuves en Europe. Il s’agit avant tout d’inventer le bouc – émissaire idéal, forcément responsable de tous les maux socio – économiques, accusé de s’infiltrer dans les rouages clef de la société. Là, il s’efforcerait de saper les fondements séculaires qui définissent un peuple, une nation basée sur des usages et des traditions. Pour s’en convaincre rien de tel qu’une aversion aveugle et sans mémoire ; elle se fait facilement la complice du crime organisé, parce qu’elle a la faculté d’anesthésier en chacun de ses adeptes les sentiments fondamentaux qui constituent l’espèce humaine. Le racisme vient en renfort tout comme l’antisémitisme, son frère de lait. Ils prospèrent main dans la main. Notamment à partir du rejet d’un simple voisin de palier dont la famille afficherait sans ostentation sa différence culturelle voire sa difficulté à maîtriser la langue du pays d’accueil. La xénophobie se nourrit de peurs, d’incompréhension, parfois de jalousie. Elle oppose le vacillement de sa propre identité à l’altérité ordinaire ; elle prend appui pour conforter son attitude sur des idéologies vénéneuses qui enseignent l’inégalité, l’exclusion allant jusqu’à dénier à l’autre le droit d’exister. La mémoire des crimes et des génocides, de leur glissement progressif vers l’horreur absolue, a pour but, certes d’entretenir le souvenir, mais aussi d’intervenir à la source du mal, avant que ne s’érige en violence d’état, l’action irrationnelle de quelques – uns, individus isolés ou groupuscules déterminés. Cela nous oblige à repenser des valeurs essentielles comme la dignité et la vérité.
La dignité s’affirme comme valeur intrinsèque, inconditionnée. Le devoir de dignité touche au respect de l’humanité, comme fin et non comme moyen, respect de soi et respect des autres, sans exception. L’homme n’est pas un moyen, une force pour arriver à des buts inavouables ou détournés, comme savent le faire les idéologies totalitaires qui pratiquent un art consommé de la manipulation. Cela s’appelle l’endoctrinement qui cultive à dessein l’aveuglement collectif, rendu insensible aux souffrances infligées aux autres au nom de l’intérêt supérieur, édicté généralement par un guide suprême. Toute considération morale disparaît alors et contamine instinctivement femmes et hommes, pères et mères, voisins et collègues. A cet égard, la responsabilité du nazisme fut à la fois individuelle et collective. Or la douleur infligée à autrui s’inscrit dans une dévalorisation de la vie toute entière. Un général franquiste galvanisait ses troupes au cri de « vive la mort !», sésame prémonitoire, à vrai dire, à l’holocauste de six millions de juifs pendant la seconde guerre mondiale. Enfin, le devoir de mémoire c’est en tout premier lieu, un devoir de vérité. La vérité n’appartient pas à un seul homme, ni à quelques uns, mais à l’arbitrage du réel, à l’objectivité des faits, ce que ne veulent pas entendre les négationnistes qui s’entêtent à nier ce que les faits démontrent : témoignages, lieux de supplices, rien n’a grâce à leurs yeux .Leurs discours sont au service de l’amnésie, pire que l’anesthésie des consciences précédemment évoqué. Ils sont les blanchisseurs de la peste brune. Leur motivation, en contestant les plus féroces exactions de l’Histoire, consiste en sous – main, à appeler de leurs vœux , le retour à des idéologies destructrices ; idéologies qui ont conduit , par une extermination programmées à :
APPEL DES PRINCIPAUX CAMPS DE CONCENTRATION DORA 28.000 MORTS BERGEN-BELSEN 50.000 MORTS GROOS-ROSEN 50.000 MORTS BUCHENWALD 56.000 MORTS STRUTHOF 65.000 MORTS DACHAU 70.000 MORTS FLOSSENBURG 73.000 MORTS THERESIENSTAT 75.000 MORTS NEUNGAMME 80.000 MORTS STUTTOF 85.000 MORTS RAVENSBRUSCK 92.000 MORTS SACHSENHAUSEN 100.000 MORTS MAUTHAUSEN 200.000 MORTS SOBIBOR 250.000 MORTS SCHELMNO 350.000 MORTS MAÏDANEK 400.000 MORTS BELZEC 600.000 MORTS TREBLINKA 700.000 MORTS AUSCHWITZ 4.000.000 MORTS CAMPS ANNEXES 1.700.000 MORTS
SOIT UN TOTAL DE 9.000.000 DE MORTS, HOMMES, FEMMES, ENFANTS, DANS LES CAMPS DE CONCENTRATION NAZIS, PENDANT LA GEURRE DE 1939 A 1945.
Rappelons que S.A.S. le Prince Albert II et la Princesse Charlène ont visité le camp d’Auschwitz – Birquenau, en octobre dernier, inscrivant sur le Livre d’Or : « La flamme de notre mémoire ne s’éteindra jamais ».
Mesdames, Messieurs, le devoir de Mémoire en cette journée de commémoration de la Déportation, c’est aussi donner la parole aux victimes, en les évoquant , et je citerai : Les époux Paule et Roger Ley, les époux Renée et Sylvie Gompars et leur fils François, Roger Bricoux, Robert Rosenganten, Norbert Finkeilstein, arrêtés à Monaco par la Gestapo et déportés, et il est bon de rappeler que sans les interventions du Prince Louis II, leur nombre eut été plus important, mais c’est également faire preuve d’une entière vigilance au nom des valeurs qui nous unissent tous, si l’on sait que de récentes statistiques font état d’un accroissement de plus de 50 % des actes antisémites en France. Or l’historien et moraliste Alexis de Tocqueville déclarait déjà au XIX ème siècle : « Quand le passé n’éclaire plus l’avenir, l’esprit marche dans les ténèbres. ». « Il existe des différences entre les cultures, a dit Stéphane Hessel, mais pas entre les civilisations. Lorsque nous vivons en sociétés, cela signifie que chaque individu a les mêmes droits fondamentaux… c’est cela la civilisation ».
Danielle Merlino |
Mise à jour le Jeudi, 02 Mai 2013 09:12 |